Transparence en berne : le mal silencieux de la RDC

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Transparence en berne : le mal silencieux de la RDC

Les grandes crises ne se manifestent pas toujours dans le fracas des armes ou les éclats de scandales médiatisés en RDC. Certaines rongent l’État de l’intérieur, lentement, discrètement, mais avec une efficacité redoutable. Le manque de transparence dans la gouvernance publique, notamment dans la passation des marchés et la gestion des ressources, constitue aujourd’hui l’un des maux les plus pernicieux et les plus dévastateurs que connaît le pays.

Derrière les discours officiels qui chantent les louanges de la bonne gouvernance, se cache une réalité tout autre : celle d’un État où l’accès à l’information est verrouillé, les données publiques jalousement gardées, et les processus décisionnels noyés dans l’opacité. Le citoyen congolais, pourtant au cœur de la démocratie, reste exclu de la compréhension des mécanismes de gestion des fonds publics. Ce silence institutionnel, souvent perçu comme banal, est en réalité une forme subtile mais efficace de confiscation du pouvoir.

La passation des marchés publics en est une illustration criante. Des contrats importants sont attribués dans la plus grande discrétion, sans appels d’offres transparents, sans contrôle parlementaire effectif, sans justification publique. Des entreprises fantômes ou des firmes de complaisance, souvent liées à des intérêts politiques, raflent des marchés stratégiques aux conséquences lourdes pour le développement national. Ce système alimente un cercle vicieux de clientélisme, de corruption et de mauvaise exécution des projets, privant la population de services de base pourtant vitaux.

Mais au-delà de la seule corruption, c’est l’absence de redevabilité qui nourrit ce cancer silencieux.  En RDC, les institutions de contrôle Cour des comptes, Inspection générale des finances, Assemblée nationale  peinent à jouer leur rôle. Par manque de volonté politique, par intimidation ou par insuffisance de moyens, elles deviennent des spectatrices d’un système opaque qu’elles sont censées réguler. Le résultat est sans appel : gaspillage des ressources, perte de confiance des bailleurs, marginalisation du secteur privé honnête et découragement de l’investissement.

Ce déficit de transparence n’est pas qu’un problème technique ou administratif. Il constitue un véritable goulot d’étranglement pour la démocratie, le développement et la stabilité du pays. Car une gouvernance opaque engendre frustration, colère populaire, et inévitablement, défiance envers les institutions. À long terme, elle sape le contrat social et alimente les dynamiques de crise.

Il est temps que les autorités congolaises comprennent que la transparence ne relève pas du luxe politique, mais de l’urgence démocratique. La publication systématique des contrats publics, la digitalisation des processus administratifs, l’indépendance des organes de contrôle et l’éducation civique sont autant de leviers concrets à activer. Tant que le pays restera plongé dans l’obscurité de la gouvernance, il marchera à tâtons vers un avenir toujours repoussé.

Dans cette guerre silencieuse, le plus grand danger, c’est le silence lui-même.

 

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